Camoin : retour sur l’exposition du plus Cézanien des Fauves à Aix-en-Provence

Le but de Charles Camoin, tel qu’il l’exprimait lui-même, était simple « N’étant ni Cézanne, ni Corot, ni Fragonard, tâcher au moins de ne pas être emmerdant ». Un objectif accompli qui nous a été prouvé, s’il le fallait encore, par l’exposition qui lui a été consacré au musée Granet d’Aix-en-Provence en 2016.

L’histoire commune à Charles Camoin et Paul Cézanne remonte à une soirée d’octobre 1901. Ce soir-là, le jeune soldat qu’était Camoin profita du stationnement de son régiment dans la Venise provençale, Aix-en-Provence, pour rendre visite à son modèle, Cézanne. Le maître, connu pour son caractère pourtant peu sympathique, se prend d’affection pour le jeune homme et ira même jusqu’à entretenir par la suite une correspondance pour lui prodiguer de précieux conseils. A seulement 22 ans, Charles Camoin s’est ainsi trouvé un mentor de choix.

Entre impressionnistes et fauves

Né à Marseille le 23 septembre 1879, Charles Camoin se destine au commerce, où du moins tel est le choix de sa famille. Cependant, un « premier prix de figure » décerné par l’Ecole des Beaux-Arts de la cité phocéenne lui fait rêver d’un avenir dans la peinture. Sitôt installé dans la capitale avec sa mère, il décide de s’inscrire à l’Ecole des Beaux-Arts de Paris où il rencontre Henri Matisse, Henri Manguin et Albert Marquet avec lesquels il travaillera dans des ateliers « libres ».

Ce choix, qui peut sembler original, était en fait d’actualité. Comme l’ont bien précisé les concepteurs de l’exposition, Charles Camoin « appartient à cette génération d’artistes qui font la charnière entre le XIXe et le XXe, époque de tous les bouleversements qu’ils soient techniques, philosophiques ou artistiques ». Ses débuts dans le milieu de la peinture sont ainsi fortement imprégnés par les impressionnistes qu’il a pu découvrir au gré de ses pérégrinations au musée du Luxembourg.

Cependant, sa rencontre aixoise avec Paul Cézanne marque un vrai tournant dans sa personnalité artistique qui s’affirme et qui l’incite à participer, avec ses trois camarades d’école Matisse, Manguin et Marquet, à la célèbre « Cage aux Fauves ».

Au milieu de ses amis, Charles Camoin étonne par sa différence artistique. « Même s’il favorise dans son œuvre l’expression par la couleur, elle demeure toujours attachée à la transcription du motif et de ses variations lumineuses. Il fut donc sans doute “le plus impressionniste des fauves” », comme le souligne l’association des Archives Camoin. Avec une précision de taille, toutefois, puisque « contrairement aux impressionnistes, il ne s’intéresse pas à l’effet atmosphérique ou aux raffinements de la perception rétinienne mais plutôt à l’agencement des formes et des plans dans l’espace perspectif, mettant ainsi en application la leçon de Cézanne qui lui conseille de “faire du Poussin sur nature” ».

Une peinture sensuelle et spontanée

L’exposition du musée Granet, qui a eu lieu à la rentrée 2016, fut un bon témoin de la liberté d’esprit de Charles Camoin et surtout de l’originalité de son œuvre. En comparaison à ses aînés, les quelques 80 tableaux qui furent exposés permettent aisément de mieux comprendre le tempérament du « vaillant Marseillais », comme le surnommait Paul Cézanne. Ainsi, l’exposition fit la part belle à ses lumineux paysages méditerranéens, croqués lors de ses voyages dans le Midi mais également à Tanger, souvenir de son pèlerinage sur les traces de Delacroix avec Matisse.

En plus des paysages, l’exposition ne délaissa pas les autres volets de son œuvre puisqu’on put découvrir à Aix-en-Provence des visages et nus féminins, ainsi que des peintures s’aventurant dans le monde infernal des marges, un talent rare reconnu par son mentor qui l’avait décrit comme étant « très fort pour peindre les boxons ! ».

Une remarque éclairée qui exprime à quel point le plaisir a pu figurer au centre de l’œuvre de Camoin qui s’est totalement révélée après la guerre comme une peinture spontanée, mais surtout voluptueuse et spontanée.

Retour sur l’exposition « Camoin dans sa lumière »

A eu lieu jusqu’au 2 octobre 2016 au Musée Granet, Aix-en-Provence

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